dimanche 29 août 2021

Le graphisme sur les corps des amérindiens

 Résumé : dans cet article, EL LAGROU propose de montrer comment plusieurs techniques formelles utilisées dans le graphisme des Indiens cashinahua et d’autres « peuples à dessin » peuvent être vues comme des techniques perspectivistes, c’est-à-dire des techniques qui aident à visualiser la potentialité de transformation des phénomènes perçus. Si l’analyse des circonstances dans lesquelles ce processus peut se produire a été amplement réalisée dans les ethnographies de la région, en revanche les techniques de cadrage visuelles qu’il implique n’ont pas été suffisamment mises en lumière. C’est là qu’apparaît l’importance d’une étude des formes, d’une esthétique perspectiviste de la transformation. Au-delà du contexte perspectiviste et animiste dans lequel s’ancre cette recherche, il explore la possibilité de considérer ces graphismes comme des « chimères abstraites ».



Une ancienne légende Shipibo circule sur l’origine des graphismes traditionnelles :


Un jour, un jeune couple de la tribu Shipibo voyageant dans la jungle arriva dans un endroit magique.
Il y avait du poisson en abondance sur la rive de la rivière, et les arbres débordaient de fruits.
En s’approchant au bord de la rivière, le mari remarqua une petite baie entourée par un mur dense de buissons et de roseaux.


Tout à coup, sur la plage, il aperçut la jeune fille.
Il n’avait jamais vu auparavant une créature si fragile, si belle et surnaturelle.
Elle était nue, et tout son corps était couvert d’un dessin étrange, une répétition de motifs étonnamment variés.

Au fond de son cœur, l’homme fut frappé par sa beauté, mais dès qu’il eut prononcé le premier mot, pour demander à la fille d’où elle venait, elle s’effondra sur le sol, morte.
Il était clair que le son de la parole humaine avait tué cette créature divine.
Stupéfait
, le jeune homme retourna auprès de sa femme pour lui raconter ce prodige. Tous les deux virent des dessins étonnants sur le corps de la défunte.
– plus tard la rumeur dit qu’elle était une sirène.


Les dessins étaient si beaux et changeants, ils semblaient avoir leur vie propre. La fille tenta de recopier ces lignes mais, malgré son application, c’était impossible – elle ne pouvait pas.
La rumeur au sujet de ce phénomène se propagea, et après un certain temps, les gens des villages même les plus reculés, venaient pour voir les dessins. Personne n’était en mesure de les copier. Et plus les gens regardaient ces lignes, moins elles devenaient claires.

Un jour pourtant, ils pourraient les voir.


Ce jour-là, de nulle part vint la vieille femme. Elle commença à enseigner les filles, leur expliquant comment créer ces lignes de vie.

« Ce soir, dit-elle, chaque mère continuera d’enseigner cet art à ses filles, transmettant ces connaissances de génération en génération.
Ces images apporteront la santé, le bonheur et le succès dans la vie de la tribu. Elles vous protégeront et vous apporteront la bonne chance. »

Tandis que les gens discutaient de ce qu’ils avaient entendu, la vieille dame disparu sans laisser de trace.
– plus tard la rumeur dit qu’elle était une sirène.


C’est ainsi que depuis des millénaires, la connaissance est transmise de mères en filles et que cette ligne ne se brise pas...

https://doi.org/10.4000/gradhiva.2040



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